Forêts

La forêt, ou couvert forestier, représente la végétation qui couvre le territoire de façon naturelle, lorsqu’il n’y a pas d’occupation du territoire ou de pratique d’activités anthropiques. Il est le meilleur régulateur de l’hydrologie du bassin versant qui soit. C’est aussi l’habitat de nombreuses espèces animales et végétales, dont certaines à statut précaire. De plus, c’est le régulateur des cycles des éléments (azote, phosphore, potassium, souffre, etc. ) et un réservoir de carbone phénoménal. Dans une étude faite sur les lacs des Cantons-de-l’Est, le professeur Yves Prairie, du GRIL (Groupe de recherche en limnologie), concluait que le facteur qui nuit le plus au lac et contribue le plus aux apports en phosphore est le déboisement. Le couvert forestier est à la base de l’activité touristique, de l’écotourisme qui prône des activités « vertes » de faible impact qui attire actuellement une clientèle de plus en plus nombreuse. 


Comment la forêt régularise l’hydrologie du bassin versant?

Qu’est-ce que l’hydrologie d’un bassin versant?

Au moment de la fonte des neiges et durant les précipitations, les cours d’eau répondent nécessairement par une augmentation de débit. Ces variations de débit sont évidemment influencées par la quantité de neige au sol et le temps quelle met à fondre, ainsi que par l’intensité et la durée des précipitations. Cependant, la rétention d’une partie de l’eau par la végétation, le sol et l’évapotranspiration influencent également la réponse du cours d’eau.

Captation et évapotranspiration de l’eau par les végétaux

Le couvert forestier favorise l’évapotranspiration, au lieu que l’eau ruisselle en surface et atteigne rapidement les cours d’eau. En effet, les plantes ont besoin de grandes quantités d’eau pour leur métabolisme. Elles interceptent une partie de l’eau de précipitation avant qu’elle ne parvienne au sol et l’évaporent ensuite dans l’atmosphère par transpiration végétale. On dit qu’à l’état naturel, la végétation du couvert forestier capte 25 % de l’eau de pluie; le reste s’infiltre dans le sol, au lieu de ruisseler en surface. Ainsi, le couvert forestier tamponne l’effet de ces gros coups d’eau. Notons que les experts prédisent une augmentation des pluies abondantes dans les années à venir.

Infiltration de l’eau dans le sol

De par sa nature poreuse, le sol forestier permet à ce que l’eau s’y infiltre et aille recharger les aquifères, au lieu de se diriger rapidement vers les cours d’eau. Notons que le déplacement de l’eau en surface est plus rapide qu’il ne le serait dans le sous-sol.

Protection contre l’impact des gouttes de pluie

Le couvert végétal est le meilleur moyen de protéger les sols contre l’éclatement des particules de sol et leur transport vers le réseau hydrique (érosion).


Quels sont les bénéfices que nous apporte le couvert forestier en tant que régulateur de l’hydrologie?

Diminution de l’érosion de surface

L’eau qui ruisselle en surface au lieu de parcourir les canaux sous terrains érode les sols.

Diminution du transport de polluants vers les écosystèmes aquatiques

L’eau qui ruisselle en surface fait son chemin vers le cours d’eau le plus près en empruntant les fossés et les égouts pluviaux ou en ruisselant sur l’asphalte, le béton, le gazon et les toits. Ce faisant, elle emporte jusqu’aux plans d’eau tous les sédiments et autres contaminants que l’on retrouve sur le sol et dans le système de drainage de la région. Lors des averses, l’eau parvenant aux rivières est particulièrement chargée de sédiments et de polluants à cause de l’érosion survenant sur le territoire urbanisé. Ces sédiments peuvent notamment transporter le phosphore, responsable de la présence de cyanobactéries dans nos cours d’eau. En conséquence, le lac reçoit plus de particules de sol, se remplit plus rapidement et son eutrophisation est accélérée.

Diminution des crues

Grâce aux phénomènes de captation, d’évapotranspiration et d’infiltration de l’eau dans le sol, le ruissellement de l’eau vers le plan d’eau est diminué de façon importante. Il en résulte une atténuation des débits de pointe (vitesse et volume d’eau) et leur étalement sur une plus longue période de temps. Les crues subites et de fortes intensités sont donc tamponnées.

Diminution des risques d’inondation

Si le couvert forestier est altéré, des inondations peuvent même survenir à des endroits où il n’y en avait pas auparavant.

Maintien de la solidité des cours d’eau

Si les débits de pointe et les vitesses d’écoulement venaient à augmenter, les berges des cours d’eau subiraient une pression accrue. Les cours d’eau répondraient par toutes sortes d’ajustement : érosion, élargissement du canal d’écoulement, sédimentation, etc. 

Maintien de la solidité des infrastructures de canalisation

L’augmentation des débits de pointe peut rendre nécessaire la reconstruction de toute une série de ponts et ponceaux qui n’étaient pas conçus pour permettre des écoulements de pointes dépassant un certain niveau.

Maintien de la pérennité des petits cours d’eau pendant les périodes d’étiage

En favorisant l’infiltration de l’eau dans le sol, le couvert forestier permet la recharge de l’aquifère, qui continuera à fournir de l’eau aux cours d’eau même lorsqu’il n’y a pas de pluie pendant une période prolongée. Les petits cours d’eau sont donc assurés d’un écoulement permanent, et non intermittent et peuvent jouer pleinement leur rôle en tant qu’habitat.


Quelles sont les menaces qui pèsent contre le couvert forestier?

Les milieux forestiers subissent de nombreuses pressions, car ils sont convoités pour diverses utilisations telles que le développement domiciliaire, la villégiature, les usages récréatifs et les pratiques forestières. Il incombe de gérer les activités de façon respectueuse pour maintenir un écosystème en santé. Il ne faut pas négliger que l'utilisation des milieux forestiers, passant de l'exploitation forestière, la chasse, le plein air et la beauté des paysages, est intimement liée au développement économique des communautés locales. Ces dernières peuvent diversifier leur revenu par une utilisation durable de ces différentes ressources et contribuer largement à la qualité de vie des résidents de la région. Le développement immobilier irresponsable est la menace principale au couvert forestier. L’altération du couvert forestier vient souvent avec l’urbanisation du territoire, où des surfaces dures et imperméables sont installées. Installation d’aires de stationnement et rues asphaltées, maisons, édifices publics, commerciaux, ceci exacerbe les problèmes que peut causer l’altération du couvert forestier à lui seul. Le déboisement intensif par exploitation forestière irresponsable est aussi une menace envers le couvert forestier, en particulier dans les pentes de plus de 15 %.


Le couvert forestier : un habitat irremplaçable

Le couvert forestier assure un habitat adéquat aux espèces floristiques et faunistiques indigènes et assure la connectivité entre ceux-ci. Les milieux forestiers de la région sont d'une grande richesse écologique. Un grand nombre d'espèces de la flore et de la faune, dont plusieurs à statut précaire, dépendent entièrement ou en partie des milieux forestiers. À titre d'exemple, on considère que plus de 90 % des espèces aviaires nord-américaines menacées dépendent des habitats forestiers; 12 % de la flore menacée ou vulnérable au Québec y trouve refuge. De plus, certains mammifères ont absolument besoin de grands territoires non perturbés pour survivre. C’est le cas notamment du lynx roux, du couguar de l’est et du loup. La construction de résidences et de routes érige des barrières à la circulation des espèces. Les populations locales se retrouvent isolées et ne peuvent plus effectuer d’échanges génétiques entre elles. À long terme, la diminution de la connectivité entre les habitats naturels compromet la survie de toutes les populations de la région, puisque la plupart des espèces ont besoin d’un brassage génétique pour rester viables. Le couvert forestier, c’est aussi le lieu de pratique des activités de chasse.


Le couvert forestier : un réservoir de carbone phénoménal

Toute la matière organique de la forêt est un immense réservoir de carbone, en particulier la matière ligneuse des arbres et le sol organique. C’est donc notre meilleur moyen de prévention de l’effet de serre. C’est là un enjeu bien réel dans le contexte des changements climatiques que nous subissons. 


Quelles sont les forêts auxquelles il faut absolument porter une attention particulière?

On retrouve sur le territoire du bassin versant du lac Memphrémagog des massifs forestiers importants et en particulier des écosystèmes forestiers exceptionnels, tels que définis par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF). Parmi ces derniers, on retrouve des forêts rares, des forêts refuges de plantes menacées, vulnérables ou susceptibles de l’être et des forêts anciennes. Actuellement, on retrouve 67 écosystèmes forestiers exceptionnels (EFE) de tenure privée en Estrie. Plus de la moitié des EFE (42) sont des forêts refuges de plantes menacées ou vulnérables, 17 sont des écosystèmes rares et les forêts anciennes sont au nombre de 8. Ils couvrent une superficie totale de 2 161 hectares. Il importe que la réglementation municipale et que le schéma d’aménagement de la MRC leur accorde un statut de protection particulier.

Forêt ancienne

Une « forêt ancienne » est un écosystème forestier où les arbres dominants ont largement dépassé leur maturité. Ces forêts possèdent une dynamique particulière. On les reconnaît par les arbres sénescents et morts de taille variable ainsi que par les troncs à divers degré de décomposition qui y jonchent le sol. Selon toute apparence, elles n’ont été que peu affectées par l’activité humaine au cours des dernières décennies. 

Écosystèmes forestiers rares

Les « écosystèmes forestiers rares » sont définis en fonction de leur composition particulière en espèces végétales, de leur structure ou de leur localisation. Ils sont qualifiés de rares parce qu’ils présentent un ensemble de conditions écologiques particulières ou parce que la plupart sont disparus sous l’effet d’activités humaines. 

Forêts refuges

Les « forêts refuges » sont caractérisées soit par la présence d’une ou plusieurs espèces végétales menacées ou vulnérables ou susceptibles de l’être, soit par la présence d’une population remarquable de l’une de ces espèces. Une espèce menacée est une espèce dont la disparition est appréhendée alors qu’une espèce vulnérable en est une dont la situation est précaire, même si sa disparition n’est pas appréhendée. 

 

Pour en connaître davantage :

Les défis de la forêt privée: La conservation, l'utilisation durable de la forêt et l'écotourisme

Agence de mise en valeur de la forêt privée de l'Estrie, 2008. Plan de protection et de mise en valeur.

Association forestière du sud du Québec (AFSQ), Portail officiel - Site Internet

Agence de mise en valeur de la forêt privée de l'Estrie (AMFE), 2009. Portail officiel - Site Internet

Regroupement des sociétés d’aménagement forestier du Québec (RESAM). Portail officiel - Site Internet

AMVFPE, 2002. Plan de protection et de mise en valeur de la forêt privée de l'Estrie – Document

AFCE, 2007. Localisation des Écosystèmes Forestiers Exceptionnels en Estrie - Carte

Le Progrès forestier, 2006. Les Écosystèmes Forestiers Exceptionnels - Article