Eutrophisation
Mise en contexte
Les études Opérations Santé du lac (2004 et 2005) ont démontré que le lac Memphrémagog subissait une eutrophisation accélérée, c’est-à-dire qu’il vieillit de façon prématurée. En effet, ce jeune lac de 10 000 ans devrait théoriquement en être à son premier stade d’évolution (stade oligotrophe), alors qu’il montre les signes d’un lac ayant atteint le deuxième stade (stade mésotrophe). Même que certains secteurs du lac Memphrémagog en sont au troisième stade du processus d’eutrophisation (eutrophe), en particulier la Baie Fitch. Cet état de fait apporte des préoccupations majeures au niveau économique et à celui de la santé publique.
Source : RAPPEL, 2009
Qu’est-ce que l’eutrophisation?
L’eutrophisation est le processus par lequel un plan d’eau vieillit. Il est caractérisé par une augmentation de la productivité du plan d’eau, qui finira par se combler et disparaître. L’eutrophisation est un processus qui, de façon naturelle, s’étale sur des siècles ou des millénaires. Par contre, les activités humaines peuvent augmenter de façon draconienne la vitesse du processus. On parle alors d’eutrophisation accélérée. Ce grave problème de santé du lac est causé par un apport excédentaire et continu de phosphore et de sédiments, au-delà de la capacité d’absorption du plan d’eau.
Où est-ce que le lac Memphrémagog en est?
Le lac Memphrémagog vieillit prématurément et les sources de contamination sont nombreuses. C’est la conclusion de l’étude approfondie Opération Santé du lac (Phase I et II) que le MCI a effectué en 2004 et 2005, en collaboration avec le RAPPEL, l’Université de Sherbrooke et le Vermont Agency of Natural Resources. De plus, selon les résultats de huit stations d’échantillonnage du Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs du Québec (MDDEP), les eaux profondes du lac Memphrémagog sont considérées globalement mésotrophes.
Quels sont les symptômes de l’eutrophisation?
L’eutrophisation accélérée d’un plan d’eau peut se manifester par des symptômes tels que les suivants :
Accumulation de sédiments dans le fond du plan d’eau (envasement)
Les sédiments qui entrent en trop grande quantité dans les plans d’eau envasent certaines parties de leur littoral (partie peu profonde du plan d’eau), de même que leur fond. En plus de fournir plus de surface facilitant la croissance de plantes aquatiques, les sédiments transportent du phosphore, principal élément nutritif qui permet la prolifération des algues et des plantes aquatiques. Dans les plans d’eau, le phosphore est généralement et naturellement présent en faible quantité. Dans ce cas, il sert alors de facteur limitant la croissance des algues et des plantes aquatiques, en ce sens que, si la quantité de phosphore est minime, les algues et les plantes aquatiques ne trouvent pas l’élément clef qui leur est nécessaire pour se développer et se multiplier. Cet équilibre naturel est donc perturbé.
Prolifération des végétaux aquatiques
L’eau plus chaude et plus riche en matières nutritives favorise une plus grande croissance de plantes aquatiques et d’algues. Peu à peu, les végétaux envahissent le plan d’eau, réduisant ainsi sa transparence et modifiant ses propriétés physico-chimiques. À la fin de chaque saison de croissance, les végétaux morts se déposent au fond du lac, où ils seront décomposés. Ceci augmente le taux d’envasement, en plus d’augmenter la demande en oxygène.
Appauvrissement de l’oxygène dans les eaux profondes
Puisque les bactéries qui décomposent la matière organique utilisent de l’oxygène, les réserves d’oxygène des zones profondes du lac s’épuisent progressivement.
Disparition des espèces de poissons les plus exigeantes en terme de concentration en oxygène
Les poissons intolérants aux eaux chaudes et au manque d’oxygène ne trouvent plus d’habitat pour vivre et meurent ou s’en vont.
Efflorescences de cyanobactéries
Lorsque le phosphore dépasse une certaine limite, les cyanobactéries dominent la communauté phytoplanctonique. L’efflorescence de cyanobactéries peut être un signe que la capacité de support du milieu a été dépassée.
Qu’est-ce qui cause l’eutrophisation accélérée?
Toutes les pratiques qui favorisent l’envoi de phosphore dans le réseau hydrique, ainsi que l’érosion des sols favorisent l’eutrophisation accélérée du lac Memphrémagog. Ces éléments polluants proviennent de notre façon d’occuper le territoire et des activités qui y ont cours. En somme, ce sont les mauvaises pratiques riveraines, municipales, forestières, industrielles et agricoles qui causent l’eutrophisation accélérée de nos lacs. En particulier, l’utilisation d’engrais sur les terrains résidentiels, l’altération de la bande riveraine, le traitement insuffisant des eaux usées et la réduction du couvert végétal, notamment par le développement immobilier.
Quelles sont les conséquences de l’eutrophisation?
L’eutrophisation d’un plan d’eau entraine des préoccupations majeures au niveau environnemental et socio-économique dans la région. En effet, le plan d’eau ne peut plus fournir les services qu’on en attend; on doit craindre les limites d’usage qu’apporte l’eutrophisation :
Menace à la santé publique
La qualité de l’eau potable peut être sévèrement affectée par l’eutrophisation accélérée. Lorsqu’une efflorescence de cyanobactéries apparaît, on ne peut plus boire cette eau, car les cyanobactéries peuvent potentiellement relâcher de toxines pathogènes. Les coûts de traitement de l’eau pour se protéger contre les toxines de cyanobactéries sont faramineux. Dans les cas sévères, il devient dangereux de s’approcher du plan d’eau ou d’y naviguer, car l’ingestion de toxines de cyanobactéries contenues dans les particules d’eau volatisées par le brassage de l’eau peuvent être toxiques. Il ne faut jamais oublier que le lac Memphrémagog est le réservoir d’eau potable utilisé par plus de 160 000 personnes.
Dégradation des zones de baignade
Il devient moins intéressant de se baigner dans un lac rempli de végétaux ou dont le fond est recouvert de vase.
Diminution de la qualité de la pêche
La pêche n’est plus intéressante, car les espèces d’intérêt sportif désertent le plan d’eau.
Perte du rôle du lac en tant que moteur économique
Puisque les abords du plan d’eau perdent leur particularité en tant que milieu de vie sain et agréable, il perd son pouvoir attractif et ne peut plus jouer le rôle de moteur de l’écotourisme de la région. La valeur des propriétés du bassin versant s’en ressent nécessairement.
Comment peut-on prévenir (freiner), voire faire régresser le processus d’eutrophisation?
Il faut comprendre que, jusqu’à une certaine limite, le phénomène de l’eutrophisation accélérée est réversible à condition que l’on diminue significativement les sources d’érosion et d’eutrophisation anthropiques. Pour freiner l’eutrophisation accélérée, il importe d’agir rapidement pour tarir les sources de sédiments et de phosphore. Pour y arriver, tous les intervenants du milieu doivent agir, et ce, de façon concertée. Une attention particulière doit être portée à la préservation et à la restauration des bandes riveraines, à la gestion des fossés routiers et agricoles, à la gestion des eaux usées ainsi qu’à l’utilisation de fertilisants à proximité du plan d’eau et de ses tributaires. Selon les mesures prises, on peut espérer freiner la dégradation du lac Memphrémagog et même, à plus long terme, améliorer son état de santé. Cependant, il faut agir vite, car plus on attend, plus la restauration du milieu sera difficile. Nous vous invitons à consulter la section menu Agissez! qui vous concerne.
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