Algues vertes filamenteuses
Les plans d’eau douce du Québec comptent 3 catégories principales d’algues : les cyanobactéries, les algues diatomées et les algues vertes. Ces petits organismes microscopiques et généralement invisibles peuvent toutefois proliférer rapidement dans certaines conditions, ce qui entraîne l’apparition de masses d’algues visibles à l’œil nu.
Dans le cas des algues vertes, certaines peuvent proliférer et former des amas filamenteux, d’où l’appellation “algues vertes filamenteuses”, qui sont de plus en plus observées par les riverains du lac Memphrémagog.
Les algues vertes filamenteuses, c’est quoi?
Les algues vertes filamenteuses appartiennent à la catégorie des algues vertes, un type de végétaux aquatiques naturellement présents dans les plans d’eau du Québec. Ce sont de minuscules organismes, souvent unicellulaires, faisant partie de l’écosystème naturel de tout milieu hydrique. Tout comme les végétaux terrestres, ces algues font de la photosynthèse et ont besoin de divers nutriments pour croître. Si une trop grande quantité de nutriments se retrouvent dans un cours d’eau, les algues commencent alors à proliférer de manière exponentielle, donnant naissance à des amas d’algues macroscopiques (visibles à l’œil nu) (RAPPEL, s.d.). Les masses d’algues vertes (à ne pas confondre avec les fleurs d’eau de cyanobactéries) ne sont pas dangereuses en elles-mêmes, mais peuvent créer un débalancement dans le milieu pouvant avoir diverses conséquences sur l’écosystème en place. On les retrouve généralement fixées au substrat (roches, bois et autres surfaces immergées), mais elles peuvent parfois se détacher et créer des masses flottantes (Clemson University, s.d.).
Images : Algues filamenteuses (MELCC [Sylvie Blais])
Comment se développent-elles ?
Les algues vertes filamenteuses font de la photosynthèse pour assurer leur croissance. Ainsi, elles utilisent les rayons du soleil et se nourrissent de divers nutriments (phosphore, azote, etc.) afin de se développer. Or, si une quantité anormalement élevée de nutriments se retrouvent dans l’eau, les algues peuvent commencer à proliférer de manière incontrôlée, ce qui indique un débalancement dans le milieu. Les surplus de nutriments proviennent, par exemple, du ruissèlement s'écoulant des terres agricoles ou de fuites de systèmes septiques (College of Agricultural, Consumer and Environmental Sciences [Rossana Sallenave], 2017). Elles peuvent apparaître dans un lac dès le printemps, lorsque la température de l’eau augmente, et se développent tout au long de l’été.
Également, ce type d’algue préfère le courant nul ou faible et les eaux peu profondes et chaudes (MELCC [Sylvie Blais], 2008). On les retrouve donc généralement sur les rives des lacs, tant accrochées au substrat qu’en amas flottant.
Image : Types d’algues selon la période de l’année (RAPPEL)
Comment différencier les algues vertes filamenteuses des fleurs d’eau (efflorescences) de cyanobactéries ?
Au premier coup d’œil, les amas d’algues vertes et les fleurs d’eau de cyanobactéries peuvent sembler très similaires. De manière générale, les algues vertes filamenteuses créent des amas épais pouvant s’apparenter à des fils de laine mouillés, des fils de coton mouillés ou des traînées vaseuses, mais il arrive qu’ils aient un aspect plus homogène s’apparentant à une efflorescence de cyanobactéries. Dans ce cas, un test simple permet de déterminer rapidement la nature de l’amas flottant : plongez un bâton de bois dans la masse d’algues et tirer pour les sortir de l’eau. Si de longs filaments pendent des deux côtés du bâton, ce sont des algues vertes filamenteuses. Si seulement quelques morceaux restent accrochés et que des mottes tombent du bâton, il s’agit sans doute de cyanobactéries (MELCC [Sylvie Blais], 2008).
Image : Conditions et options de contrôle des algues vertes filamenteuses (Clemson University)
Les algues vertes filamenteuses sont-elles dangereuses pour l’humain ?
Lorsqu’il en vient à la santé des baigneurs et des riverains, il faut faire preuve de prudence. Si les algues vertes ne sont pas toxiques ou dangereuses en elles-mêmes, les tapis d’algues peuvent toutefois devenir un site de prolifération pour diverses bactéries nuisibles. De plus, il incombe de différencier adéquatement les algues vertes filamenteuses des efflorescences de cyanobactéries qui, elles, peuvent libérer des toxines dangereuses pour la santé humaine. Si vous observez une masse d’algues, il est important de ne pas entrer en contact avec celles-ci et de s’équiper d’un équipement de protection adéquat si leur manipulation est nécessaire (Clemson University, s.d.).
Les algues vertes filamenteuses sont-elles dangereuses pour l’environnement ?
Les algues vertes font partie de l’écosystème naturel du milieu lacustre. Toutefois, en cas de prolifération excessive, elles peuvent devenir problématiques pour l'écosystème qui les supporte. En effet, une surabondance d’algues peut débalancer l’équilibre naturel du milieu : les grandes étendues flottantes bloquent l’entrée des rayons du soleil dans le lac, ce qui modifie la température habituelle de l’eau et privent les autres plantes aquatiques de lumière (CRE Laurentides, 2019).
Une autre problématique est à considérer : celle de la décomposition des algues. À leur mort, les grands amas d’algues vertes filamenteuses représentent d’énorme quantités de matière organique à décomposer, ce qui entraîne une forte demande en oxygène par les organismes décomposeurs. Il en résulte alors une baisse de la concentration d’oxygène dissout disponible pour les autres espèces qui en dépendent. Le milieu appauvrit supporte alors plus difficilement la faune aquatique (CRE Laurentides, 2019).
Quelles sont les conséquences socio-économiques du développement massif d’algues vertes filamenteuses ?
Une surabondance d’algues vertes filamenteuses peut également devenir un problème pour l’activité humaine. En effet, les masses d'algues peuvent affecter la sphère récréotouristique en nuisant aux activités nautiques et à la baignade (College of Agricultural, Consumer and Environmental Sciences [Rossana Sallenave], 2017). De plus, elles peuvent donner à l’eau une odeur et un goût désagréable, entraîner l’obstruction des prises d’eau et des filtres des installations d’eau potable et générer une augmentation du coût de traitement de l’eau potable (CRE Laurentides, 2019). Rappelons-nous que le lac Memphrémagog est la source d’eau potable pour plus de 175 000 personnes.
Comment peut-on prévenir la prolifération des algues vertes filamenteuses ?
La meilleure manière de prévenir leur développement est de limiter l'apport excessif en nutriments dans le milieu hydrique. Ceci peut être réalisé en adressant les principales sources de ruissellement chargées en éléments nutritifs, notamment le ruissèlement urbain, le ruissèlement agricole et les fuites des systèmes septiques (College of Agricultural, Consumer and Environmental Sciences [Rossana Sallenave], 2017).
Ruissèlement urbain
Le ruissèlement urbain provient de sources diverses. Une des sources majeures de nutriments est la fertilisation des pelouses à proximité des cours d’eau. En effet, les fertilisants pour le gazon et les plates-bandes peuvent être entraînés par les eaux de pluie et ruisseler jusqu’au plan d’eau. Heureusement, plusieurs bonnes pratiques existent afin de prévenir ce genre de situation.
Milieux agricoles
Dans les milieux agricoles, plusieurs stratégies peuvent être mises en place afin d’éviter la perte d’éléments nutritifs sur les terrains (gestion de l’épandage, limite de l’accès du bétail au cours d’eau, etc.). Pour plus d’informations sur les bonnes pratiques agricoles à adopter, visitez notre page Activités agricoles.
Fuites d’installations septiques
Les installations septiques servant à traiter les eaux usées domestiques contiennent des eaux très chargées en nutriments. Il est donc primordial d’effectuer un entretien régulier et adéquat de ces installations afin d’éviter les fuites et l’apport de nutriments dans les cours d’eau.
De manière générale, une bonne méthode de prévention de l’érosion et de l’apport en nutriments au lac consiste à entretenir une bande riveraine suffisamment large et dense, composée de plusieurs strates végétales.
Comment contrôler les masses d’algues vertes filamenteuses ?
Une fois les amas d’algues en place, il est difficile de les éradiquer. Certaines méthodes de contrôle existent, mais leur effet est généralement de court-terme :
Contrôle mécanique
Dans le cas où elles deviendraient problématiques, il est possible de retirer manuellement les algues filamenteuses, avec un râteau ou un filet (College of Agricultural, Consumer and Environmental Sciences [Rossana Sallenave], 2017). Une fois collectées, les algues devraient être séchées et jetées. Il est primordial de ne pas laisser d’amoncellement d’algues sur la rive, afin d’éviter que ceux-ci ne retombent dans l’eau et qu’ils créent davantage de problèmes lors de leur décomposition. De plus, il est conseillé d’éviter de manipuler directement les algues. Même si elles ne sont pas dangereuses en elles-mêmes, elles peuvent contenir diverses substances nuisibles.
Contrôle technologique
Une technologie a commencé à faire ses preuves : le “jardin flottant” ou “floating wetland". Cette pratique consiste à mettre en place un jardin flottant de plantes indigènes. Le principe est simple : les racines des plantes, qui se développent dans l’eau du lac, captent l’excédent de nutriments et préviennent ainsi une concentration trop élevée de ceux-ci (Clemson University, s.d.). Cette technique est cependant dispendieuse et fonctionne plus efficacement sur de petits plans d’eau.
Contrôle chimique
Enfin, notons que l’utilisation d’algicide n’est pas recommandée. Si ce produit semble être une solution facile, son effet n'est que temporaire et peut engendrer d’autres problèmes bien plus graves : toxicité pour l’humain et d’autres espèces, changement du pH de l'eau, etc.
Références
RAPPEL, s.d. Les algues et les cyanobactéries
Clemson University, s.d. Filamentous Algae Conditions and Control Options
College of Agricultural, Consumer and Environmental Sciences (Rossana Sallenave), 2017. Managing Filamentous Algae in Ponds
MELCC [Sylvie Blais], 2008. Guide d’identification des fleurs d’eau de cyanobactéries : comment les distinguer des végétaux observés dans nos lacs et rivières
CRE Laurentides, 2019. Les algues
Association des propriétaires du Lac Rouge de Saint-Didace, 2006. Algues filamenteuses
Étang-solution, s.d. Comment supprimer les algues de mon étang?